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Quelle est la différence entre la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) et la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) ?

Parfois confondues sous le même terme de “justice européenne”, ces deux cours doivent pourtant être distinguées. La CJUE est une institution de l’Union européenne, la CEDH dépend du Conseil de l’Europe.

La Cour de justice de l’Union européenne (à gauche) siège à Luxembourg, la Cour européenne des droits de l’homme (à droite) siège à Strasbourg - Crédits : Cour de justice de l’UE | ollo / iStock

En novembre 2019, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) jugeait qu’une réforme des tribunaux introduite en Pologne en 2017 enfreignait le droit européen. En octobre dernier, une autre chambre rendait un arrêt sur le même sujet : la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) estimait que la loi polonaise abaissant l’âge du départ à la retraite des magistrates à 60 ans était contraire à la législation européenne.

Parfois confondues sous le même terme de “justice européenne”, voire de “Cour européenne”, ces deux institutions sont pourtant bien distinctes. La CJUE est l’institution judiciaire de l’Union européenne. La CEDH est quant à elle une émanation du Conseil de l’Europe, une organisation internationale elle-même distincte de l’UE.

Le Conseil de l’Europe ne doit lui-même pas être confondu avec le Conseil de l’UE (qui réunit les gouvernements de l’UE) et le Conseil européen (la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE).

Qu’est-ce que la Cour de justice de l’UE ?

Comme son nom l’indique, la Cour de justice de l’UE est l’une des sept institutions de l’Union européenne. Composée de 27 juges – un par Etat membre – et de 11 avocats généraux, la CJUE siège à Luxembourg. L’institution comprend aussi une seconde juridiction : le Tribunal, composé de deux juges par Etat membre et chargé de certaines affaires.

La CJUE veille à ce que le droit de l’UE soit bien appliqué. Elle règle aussi les différends juridiques entre Etats membres et institutions. Un juge national peut poser une question à la CJUE s’il estime qu’un cas dont il a la charge dans son pays relève en partie du droit de l’Union.

Qu’est-ce que la Cour européenne des droits de l’homme ?

La Cour européenne des droits de l’homme est quant à elle le bras judiciaire du Conseil de l’Europe. Le Conseil de l’Europe est une organisation intergouvernementale fondée en 1949 afin de promouvoir la démocratie, les droits humains et la paix sur le continent. Il compte 46 Etats membres, dont les 27 pays de l’UE. Composée d’autant de juges, la Cour européenne des droits de l’homme siège à Strasbourg.

Depuis 1959, la CEDH s’assure du respect de la “Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales” (ou “Convention européenne des droits de l’homme”). Ce traité protège quelques grands principes, comme le droit à un procès équitable, l’interdiction de la torture ou encore la liberté d’expression. Il a été enrichi au fil du temps, plusieurs nouveaux droits étant venus s’ajouter au texte initial avec l’adoption de protocoles additionnels. Ceux-ci portent par exemple sur l’abolition de la peine de mort, la protection de la propriété ou le droit à des élections libres.

La portée des décisions diffère entre les deux cours. Un arrêt de la CEDH est surtout déclaratoire, même si les Etats membres se sont engagés à se conformer à ceux qui les concernent. Tandis qu’un arrêt rendu par la CJUE est contraignant et peut donner lieu à une amende.

L’exemple polonais

Si les deux juridictions ont rendu des arrêts comparables dans l’exemple polonais cité plus haut, les cours ne s’appuient pas sur la même base juridique. La CJUE estime ainsi que la Pologne a enfreint une directive de l’Union européenne de 2006 relative à l’égalité femmes/hommes en matière d’emploi. L’âge de départ à la retraite des magistrates polonaises à 60 ans était prévu à 65 ans pour leurs homologues masculins, ce qui constituait une discrimination fondée sur le genre. Dans sa décision, la CEDH s’appuie quant à elle sur les articles 6 (droit à un procès équitable) et 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme.

Il n’en demeure pas moins que ces deux cours s’influencent mutuellement. D’autant que chacune a des compétences en matière de droits humains. Si la protection des droits de l’homme relève de l’évidence pour la CEDH, dont c’est la mission depuis sa création, l’Union européenne s’est elle-même dotée d’une Charte des droits fondamentaux destinée à sauvegarder les libertés fondamentales. Depuis 2009, cette charte a la même valeur juridique que les traités de l’Union européenne : la CJUE en est donc la gardienne.

Ainsi, “les références croisées sont nombreuses” entre les décisions des deux cours, remarque Peggy Ducoulombier, professeure de droit à l’Université de Strasbourg. Notamment “dans les affaires qui se retrouvent devant les deux juridictions”. Dans son arrêt du 24 octobre dernier sur la réforme judiciaire polonaise, la Cour européenne des droits de l’homme cite en effet 38 fois la CJUE pour reprendre ses conclusions !

Ces références sont également importantes lorsque les cours font face à des problématiques communes comme les restrictions au droit de propriété, la discrimination sur le fondement de la religion ou la prise en compte du respect des droits fondamentaux”, à l’image du domaine de l’asile, poursuit la juriste.

Signé en 2007, le traité de Lisbonne prévoit d’ailleurs que l’Union européenne adhère à la CEDH. Complexes sur le plan juridique, les négociations ont de nouveau été freinées en 2014 par un avis défavorable de la Cour de justice de l’UE.

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