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Elections européennes 2024 : le programme de Jordan Bardella et du Rassemblement national (RN)

Menée par Jordan Bardella pour le scrutin du 9 juin, la liste du Rassemblement national appelle à “bâtir l’Europe du XXIème siècle”. Voici les principaux éléments du programme européen du RN.

Jordan Bardella en meeting à Marseille, le 3 mars 2024 - Crédits : compte X @J_Bardella

La France revient, l’Europe revit !”, tel est le slogan de la liste du Rassemblement national pour les élections européennes du 9 juin. Dévoilé le 26 avril dernier, le programme du RN est divisé en trois axes : “L’Europe qui protège”, “L’Europe qui produit” et “L’Europe qui respecte”, répartis sur une quinzaine de pages.

Primauté du droit français sur les législations européennes, priorité nationale pour les marchés publics, limitation drastique du rôle de la Commission européenne… Si le parti d’extrême droite ne réclame plus depuis plusieurs années une sortie de la France de l’Union européenne, son programme remet toutefois en cause les fondements mêmes de la construction communautaire.

Une “stratégie tricolore” pour “réactualiser le logiciel européen

Dans son projet pour les élections du 9 juin, le RN indique sa volonté de mettre en œuvre une “stratégie tricolore”, avec un classement des politiques européennes en trois couleurs distinctes. En vert, celles que le parti soutient, à l’instar d’Erasmus+. En jaune, celles qu’il accepte sous conditions, comme l’espace Schengen, “à condition que la libre-circulation profite exclusivement aux ressortissants des Etats membres”. En rouge enfin, les politiques que le RN rejette catégoriquement, telles que l’élargissement de l’UE.

L’Europe qui protège

Affirmant son opposition à “l’immigration de masse” et à la “concurrence déloyale”, le RN entend “réhabiliter la frontière comme outil de protection et de régulation”. Tant en matière commerciale, en passant “du libre-échange déloyal au juste-échange”, que migratoire en évoluant “de l’Europe passoire à la sécurité des peuples”. 

Pour “établir une concurrence extra-européenne loyale”, le parti dirigé par Jordan Bardella veut notamment mettre en place “un moratoire sur la négociation de nouveaux accords de libre-échange par l’UE”. A l’heure actuelle, l’UE négocie des accords commerciaux avec plusieurs pays, à l’instar de l’Inde, de la Thaïlande ou encore de l’Indonésie. Des négociations que le RN désire donc suspendre.

Dans le domaine du commerce extérieur également, la liste menée par Jordan Bardella souhaite que la “taxe carbone” aux frontières de l’Union européenne (le mécanisme d’ajustement carbone adopté en mai 2023) s’applique aux produits finis et semi-finis, plutôt qu’aux matières premières. A ce jour, certains produits finis sont déjà concernés par la législation, comme les engrais azotés ou encore les vis et les boulons.

Au sein du marché unique, le RN se positionne contre le travail détaché, qui permet à des entreprises européennes d’envoyer leurs salariés travailler pendant une durée déterminée dans un autre Etat membre. Un système qualifié de “véritable délocalisation à domicile qui pénalise les salariés français de nombreux secteurs, comme le BTP et le transport routier”. Le parti s’oppose aussi à l’élargissement de l’UE (neufs pays sont officiellement candidats), “qui ruinerait notre agriculture et exercerait une pression à la baisse sur le salaire des Français”.

Concernant les questions migratoires, le RN défend un retour des contrôles aux frontières nationales françaises. Et au niveau de l’espace Schengen, il veut “restreindre la libre-circulation […] aux seuls ressortissants des pays membres”. La formation d’extrême droite entend aussi conditionner le versement d’aides au développement à des Etats tiers en fonction de leur coopération en matière d’immigration (“maintien des populations dans leur pays d’origine, lutte contre les passeurs, reprise effective de leurs ressortissants expulsés”).

Jordan Bardella et ses colistiers appellent par ailleurs à l’organisation d’un référendum pour réaffirmer “la primauté de la Constitution française sur les décisions des juges européens en matière d’immigration”. Une position qui remet en cause la primauté du droit européen en la matière, c’est-à-dire sa supériorité vis-à-vis du droit français, au même titre que l’ensemble des traités internationaux signés par la France.

L’Europe qui produit

Avec cet axe de son programme, le RN a pour objectif de reprendre “le contrôle de notre souveraineté pour rétablir la prospérité économique et préserver le modèle social des Français”. Pour ce faire, le parti souhaite “refaire de la France un paradis énergétique” et “libérer les entreprises de la bureaucratie européenne”. Il prend également position contre le Pacte vert, la feuille de route environnementale de l’UE pour atteindre la neutralité climatique à l’horizon 2050, et son “écologie punitive”.

Dans le domaine de l’énergie, le RN veut notamment faire “baisser de 30 à 40 % la facture d’électricité en rétablissant un prix français de l’électricité, par la fin des règles absurdes du marché européen de l’énergie”. Pour “protéger le mix énergétique français”, il appelle à investir dans les “technologies d’avenir (nucléaire de nouvelle génération, hydrogène, géothermie…)”, tout en s’opposant à la libéralisation des concessions des barrages hydroélectriques et au développement des éoliennes “imposés par l’UE”.

En ce qui concerne les entreprises, la liste dénonce un “fardeau normatif” européen. Elle se positionne en faveur d’une “pause réglementaire” et souhaite “engager le chantier de la simplification”. Dans le viseur du RN se trouvent par exemple les directives CSRD et sur le devoir de vigilance, qui renforcent les obligations des sociétés européennes en termes de responsabilité sociale et environnementale.

Pour “défendre nos emplois et l’environnement”, le parti veut aussi autoriser une priorité nationale dans les attributions de marchés publics. Une évolution qui serait contraire aux bases du fonctionnement du marché unique : celui-ci implique une non-discrimination entre les entreprises de l’ensemble des 27 Etats membres de l’UE.

Sur le Pacte vert, le RN s’oppose également à de grands chantiers tels que la stratégie “De la ferme à la fourchette”. Cette déclinaison du Pacte dans le domaine de l’alimentation, dont les principales mesures ont par ailleurs déjà été rejetées par le Parlement européen, est qualifiée de “stratégie de décroissance” contraire aux intérêts des agriculteurs. Le parti de Jordan Bardella s’oppose également à l’interdiction de la vente de voitures thermiques neuves à partir de 2035, décidée l’année dernière par les eurodéputés et les Etats membres.

L’Europe qui respecte

Le troisième axe du programme est centré sur les institutions européennes. Il préconise la transformation de l’UE en une “Alliance européenne des nations”, synonyme d’une forte diminution de ses compétences actuelles. Une évolution radicale, qui demanderait d’importantes modifications des traités européens et donc l’approbation unanime des Vingt-Sept.

Le RN exprime de nouveau ici sa volonté de “réaffirmer la supériorité de la Constitution française sur les normes et juridictions européennes”. Le parti veut ainsi revenir sur le cœur de la construction européenne, où le droit communautaire, décidé par les Etats membres et les eurodéputés, prime les droits nationaux.

Dans l’architecture institutionnelle promue par la formation d’extrême droite, le pouvoir serait bien plus concentré dans les mains des Etats membres. Ces derniers récupéreraient l’exclusivité de l’initiative législative, qui reviendrait au Conseil de l’UE au détriment de la Commission européenne. Celle-ci serait transformée en un “Secrétariat général du Conseil” (un organe existe déjà sous ce nom). Le RN milite aussi pour une extension des domaines où l’unanimité des Etats membres au Conseil est requise, notamment au commerce.

Cette recomposition institutionnelle doit servir l’objectif de “bâtir l’Europe des projets à la carte”, constituées de “coopérations librement consenties par les Etats et à leur initiative”. Parmi les domaines de coopération soutenus par le RN figurent notamment le contrôle des frontières avec l’agence Frontex, l’éducation avec Erasmus+, l’aérospatial avec Ariane et Airbus, la défense ou encore l’intelligence artificielle.

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